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lundi 18 novembre 2019

La mémoire hémiplégique de Pedro Sanchez


El honor perdido de Don Pedro


Pedro Sanchez (né en 1972, président PSOE du gouvernement espagnol 2018-    )



Une figure socialiste espagnole explique son opposition à l’exhumation de Franco (N.B. : l'exhumation de Franco et l'expulsion de ses restes de la Valle de los Caidos, sur ordre du gouvernement de Pedro Sanchez, sont intervenues le 24:10/2019. Pis qu'un crime : une faute).


9 septembre 2018 | Polémia


Par Joaquín Leguina (photo), homme politique socialiste, économiste, démographe et écrivain ♦


COMMENTAIRE DU TRADUCTEUR :

Le premier ministre espagnol, l’immigrationniste et mondialiste Pedro  Sanchez, a décidé de raviver, 80 ans après sa fin, les plaies de la  guerre civile espagnole. En s’en prenant au mémorial de la Vallée de Los  Caidos et en retirant la dépouille du général Franco.
Cette  volonté d’imposer une histoire en noir et blanc – où les « méchants »  seraient d’un seul côté et les « gentils » de l’autre – est loin de  faire l’unanimité en Espagne. Y compris du côté socialiste. Parmi  d’autres, le socialiste madrilène Joaquín Leguina, acteur politique  majeur de la « transition démocratique », critique sévèrement cette  décision. Et rappelle que des atrocités ont été commises des deux côtés.
La signification de la loi d’amnistie de 1977 et celle de la  Constitution de 1978 était la réconciliation nationale et l’oubli de la  guerre civile, car dans la guerre, les deux camps se livrent au «  nettoyage de l’ennemi », même si on cherche aujourd’hui à sanctifier  l’un des deux camps.

Joaquin Leguina, né en 1941, ancien mandataire socialiste (PSOE) de Madrid

L’ ARTICLE DE JOAQUIN LEGUINA COMMENCE CI-APRES :


“Il est invraisemblable que le nouveau PSOE  veuille réécrire l’histoire avec une nouvelle Loi de mémoire historique  [1] qui interdirait de dire ce que je vais maintenant vous raconter. Car  il s’agit de deux histoires terribles qui impliquent des socialistes  avec leur carte du parti.


Le 2 juillet 1936, des tueurs  membres  des JSU (Jeunesses socialistes unifiées) sont entrés dans un bar  fréquenté par des jeunes et ont tué deux étudiants phalangistes [2]. Peu  de temps après, des tueurs de droite ont assassiné José del Castillo,  qui était un lieutenant de la Garde d’assaut [3] et un socialiste bien  connu.


 Le 12 juillet 1936, un capitaine de la Garde Civile, Fernando  Condés (un militant de gauche qui avait participé à la révolte contre le  gouvernement d’Alejandro Lerroux à Madrid, en octobre 1934) [4],  habillé en civil et accompagné de quatre hommes armés, qui étaient des  socialistes de la Motorizada [5], ont présenté leurs lettres de créance  aux policiers qui protégeaient le parlementaire de droite José Calvo  Sotelo, ont pénétré chez lui et l’ont emmené dans une camionnette de la  Garde d’assaut. Luis Cuenca, un socialiste proche d’Indalecio Prieto,  lui a aussitôt tiré deux balles dans la tête par derrière. Puis, ces  hommes se sont rendus au cimetière de l’Almudena et ont jeté le corps du  parlementaire à l’entrée du funérarium. Condès est allé ensuite se  cacher chez la député socialiste Margarita Nelken. 

La guerre civile n’a  pas tardé à éclater et à l’arrière-garde du camp républicain, quelques  40 000 personnes ont été assassinées, dont 7 000 prêtres, religieuses,  séminaristes, dont douze évêques.

À Madrid, plus de 60 tchékas  [6] (pour reprendre la terminologie russe) ont fonctionné à plein  régime. Grâce à leurs méthodes de détentions illégales, plus de 10 000  personnes ont été tuées dans la seule arrière-garde de Madrid. La tchéka  la plus célèbre s’appelait La brigada del amanecer (La brigade de  l’aube). Elle était dirigée par Agapito García Atadell, l’ancien  secrétaire général du syndicat des imprimeurs de l’UGT (Union générale  des Travailleurs). Ces personnes dépourvues de toute humanité, entraient  dans les maisons pour les piller et emmenaient les gens jugés suspects  pour les liquider au cours d’une « promenade ». Lorsqu’en novembre 1936  les troupes franquistes ont menacé de prendre Madrid, le courageux  combattant García Atadell a récupéré une bonne partie des biens qu’il  avait volés et, rejoint par deux complices et leurs épouses respectives,  il s’est enfui à Marseille. Une fois parvenu dans le port français, il a  pris un bateau pour l’Amérique. Mais il a été arrêté à Las Palmas où le  navire a fait escale (on a dit que les gens de Prieto l’avaient  dénoncé). Atadell a été par la suite transféré à la prison de Séville,  où il a rencontré l’écrivain Arthur Koestler, et il a été très  rapidement exécuté. Est-ce à dire qu’Atadell est  aussi  une victime du  franquisme ?

Les gens de ma génération (Joaquin Laguina est né en 1941), et encore moins ceux des  générations suivantes, n’ont aucune responsabilité dans les événements  que je viens de relater, mais en tant que personne morale, le PSOE  ferait bien d’oublier toutes les atrocités de la guerre, celles des deux  camps”.

FIN DE L’ARTICLE DE JOAQUIN LEGUINA


Joaquín Leguina
 09/09/2018


[Toutes les notes sont du traducteur]

[1] A la suite de la présentation d’une proposition de nouvelle loi  modifiant la loi de Mémoire historique de 2007, présentée au nom du  groupe socialiste, par Margarita Robles Flores (actuelle ministre de la  défense) fin 2017, le journaliste Carlos Herrera  a interpellé le leader  socialiste en ces termes: « Voyons Sánchez, tu proposerais  qu’on me  mette une amende et qu’on me jette en prison si je mettais une plaque à  la porte de la maison de mon grand-père rappelant qu’il a été assassiné  par des miliciens anarchistes en 1938 ? Ce n’est pas une question  rhétorique, c’est la réalité historique […] On pourrait donc rappeler  seulement les grands-pères des uns et pas ceux des autres ? … Les  socialistes veulent être ceux qui décident de la réalité de l’histoire…  Ils ont lu Orwell, ils l’ont cru et ils l’ont intériorisé… Il ne  manquerait plus qu’ils inventent une nouvelle sorte de tcheka pour  attraper les dissidents » (Carlos Herrera, « Aquellos fusilados en las  tapias », ABC, 16 février 2018) [NdT].


[2] Les deux étudiants  phalangistes étaient Miguel Arriol (19 ans) et Jacobo Galán (18 ans).  Ils étaient à la terrasse du Bar Roig de Madrid, rue Torrijos,  lorsqu’ils ont été criblés de balles à partir d’un véhicule surgi  soudainement. Plusieurs autres per
sonnes furent blessées, dont le joueur  du Real Madrid, Felix Quesada [NdT].


[3] Équivalent des CRS [NdT].

[4] Alejandro Lerroux était le leader du parti radical (auquel  s’opposait la branche radicale-socialiste qui avait fait sécession).  Lors du soulèvement socialiste, putsch en bonne et due forme d’octobre  1934, Franco qui était aux ordres de Lerroux est apparu comme le sauveur  de la République [NdT].


[5] La Motorizada était une milice  socialiste aux ordres d’Indalecio Prieto dont la  tendance relativement  modérée, se distinguait de celle du socialiste bolchevisé, le Lénine  espagnol, Francisco Largo Caballero [NdT].


[6] En espagnol les  checas ou chekas étaient des organisations officielles ou non, de  l’État, des partis ou des syndicats, qui arrêtaient, jugeaient,  torturaient et assassinaient en toute impunité dans la zone républicaine  ou du Front populaire [NdT].


Source : Traduction d’une tribune pour El Economista via correspondance Polémia
Crédit photo : [CC BY-SA 4.0], via Wikimedia Commo

samedi 16 août 2014

Arte : un canal de mierda

Cet article est dédié à William Irigoyen, journaliste d'Arte
et enfant d'Euzkadi à la sensibilité olfacto-politique très
affinée (1), et à l'engagement sans failles en faveur de
l'hyper-correction politique et historique (2).



L'édition en français de 19h45 d'Arte Journal est présentée
le jeudi 19 juin MMXIV par Leïla Kaddour Boudadi; cette
présentatrice d'Arte , diplômée de Lettres Classiques s'est
illustrée en traitant Silvio Berlusconi de "Néron de l'Italie
moderne" (sic). C'est ce qui s'appelle avoir un transport
d'histoire romaine au cerveau. Un transport haineux.
Un homme d'Etat dont Arte fait un de ses Grands Satans
ne peut pas être mauvais.




Mais le grand évènement de la journée est l'accession au
trone d'Espagne du roi Felipe VI de Borbon y Borbon.
Arte Journal le couvre à sa façon : très engagée en faveur
des héritiers des Rouges de la Guerre Civile espagnole de
1936-1939. Les directeurs de conscience d'Arte n'ont pas
digéré le compromis passé après la disparition de Franco
entre les vainqueurs et les vaincus de 1939. Pour Arte,
il y a toujours des bons et des mauvais. Les mauvais
sont les franquistes et ceux à qui la victoire franquiste
de 1939 a permis, même à des décennies de distance,
de prendre la place des Rouges. Les Rouges sont les
bons, même terroristes, même auteurs d'exactions
et de provocations : ne sont-ils pas historiquement dans
le même camp que la coalition anti-hitlérienne de 1933-
1945 ? Pour Arte, c'est le critère déterminant. Arte, c'est
la chaîne de la Mémouare, la chaîne du shoacentrisme.
C'est une chaîne qui n'a de franco-allemand que le
financement, mais dont le coeur est ailleurs, notamment
à Yad Vashem.


Arte Journal marque l'intronisation de Felipe VI en nous
promenant dans Madrid pour nous y présenter des
adversaires de la monarchie, des héritiers des Rouges de
la Guerra Civil 1936-1939. Certains exigent que l'électorat
soit consulté par referendum pour rétablir une République.
D'autres exhalent leur haine recuite des non-républicains.

Arte Journal donne ainsi la parole à un républicain de......
103 ans, ancien combattant de la Guerra Civil qui exhibe
devant les caméras d'Arte ses varices pour essayer de
nous montrer la malfaisance des franquistes qui l'auraient
blessé à une jambe. Les méchants ! Chacun sait que les
frères d'armes de ce centenaire (j'ai l'impression que la
méchanceté conserve, et est un facteur de longévité) qui
déterraient les corps des religieuses dans les cimetières
à Barcelone étaient des non-violents incapables de faire
du mal à une mouche.....

Puis Arte Journal donne la parole à un Rouge un peu
plus jeune, un "républicain" qui accuse l'ancien roi
Juan Carlos Ier de s'être "enrichi" personnellement
lors de voyages à l'étranger payés par le contribuable
espagnol. Ce bonhomme porte une accusation absurde
née de son imagination et nourrie par le ressentiment.
Tous les chefs d'Etat, F. Hollande en tête, voyagent à
l'étranger accompagnés de missions économiques
dont le but est de conclure des contrats, de prendre
des commandes en faveur de l'économie du pays
qu'ils représentent. C'est ce qu'a fait Juan Carlos Ier.
Ce que font tous les chefs d'Etat. L'accusation ne
tient pas debout, mais Arte Journal laisse le dernier
mot à ce quidam, sans remise en contexte, sans
contestation.

Ayant satisfait à son "devoir de mémoire" indirectement
nourri par le shoacentrisme de ses directeurs de
conscience, Arte Journal nous emmène plus au Nord,
à Calais. Là, Arte Journal va pouvoir satisfaire à une
autre de ses obsessions : la défense de l'immigration
intercontinentale sud-nord vers l'Europe et la
diabolisation, au nom de l'antiracisme, de toute
attitude de résistance à cette immigration.

Ce jour-là, Arte Journal essaye de nous démontrer
qu'il est non seulement immoral, mais encore inutile
de déplacer les immigrés qui nous font le cadeau de
vouloir vivre parmi nous : ils reviennent toujours,
soutenus par un essaim d'associations et d'activistes
qui veulent imposer leur présence et les coûts
matériels et moraux (3) de leur intégration à tous, à vous,
à moi. Arte Journal ne donne la parole qu'aux militants
associatifs qui tiennent à aider, à retenir les résidents
illégaux en-quête-d'-une-vie-meilleure et dont nous
aurions....besoin. Ces militants des lobbies migratoires
sont généreux avec ce qui n'est pas qu'à eux, donc pas
à eux. Il n'est pas question pour Arte Journal de donner
la parole aux Calaisiens exaspérés de vivre en territoire
occupé par les protégés de la CIMADE, et d'autres
associations malfaisantes. Ce serait "libérer une parole
de haine" (sic). Les directeurs de conscience d'Arte
Journal ne pourraient le supporter.
 
NOTES

(1) William Irigoyen peut bien porter un nom basque,
son odorat a l'acuité, appliquée à la politique, d'un
nez grassois : il a ainsi qualifié de "nauséabonds" :
l'appel du cardinal Glemp à ses "chers frères juifs" à
cesser d'attiser la querelle du Carmel d'Auschwitz;
l'affirmation de Joe Biden, concurrent d'Obama à la
primaire démocrate de 2008, et futur co-listier de ce
dernier, selon laquelle sa mélanodermie (=peau noire)
était le seul atout, médiatiquement exploité, d'Obama;


(2) en 2004, couvrant les commémorations de ce
qu'a été en août 1944 la prétendue "libération de
Paris" (sic), boucherie militairement inutile à
l'initiative des bandes de Rol-Tanguy et de ses
acolytes, William Irigoyen avance que les combats
ont fait....environ 400 morts. C'est-à-dire que sont
deshumanisés les plus de 3 000 morts et blessés,
dont certains intransportables, du côté allemand.
La prétendue "libération de Paris" de 1944, c'est
d'abord celle d'une rage germanochtone;


(3) lors de la crise sociale de l'hiver 2009 aux Antilles
et plus particulièrement en Guadeloupe, un porte-
parole des agitateurs en France d'Europe, un
médecin guadeloupéen de l'Hôpital Necker expliquait
ainsi la crise : vous nous avez mis en esclavage, vous
nous avez affranchis en 1848, mais....vous en êtes
restés là (sic). Autrement dit, on n'en a jamais fini avec
l'intégration de personnes issues de groupes
tels que les victimes de l'esclavage, les immigrés
illégaux. Bien des générations plus tard, leurs
descendants n'hésiteront pas à réclamer aux vôtres
"encore un effort" pour "réparer" une injustice réelle
ou fantasmée, désignée comme l'origine de leurs
difficultés. Les descendants des immigrés illégaux
d'aujourd'hui ne seront pas gênés de prétendre que
l'intégration de leurs ancêtres en Europe a été baclée
et imparfaite, et qu'ils ont droit à des réparations,
encore et encore. C'est ce que je désigne comme
le coût moral des flux migratoires. Qui pésera sur
les descendants de ceux qui ont vu accueillir leurs
ancêtres et n'ont pas pu s'opposer à cette
colonisation de peuplement.

 

jeudi 31 mai 2012

Valls : les leurres du beau Manuel

Le Sinistre (1) de l'Intérieur, Manuel Valls, était l'invité du JT de 20h le jeudi 31 mai sur France 2, et répondait aux questions de David Pujadas.

David Pujadas affime que son invité est le ministre le plus populaire du gouvernement; si c'est vrai cela signifie que l'intoxication socialiste est efficace : l'actuel gouvernement a intérêt à faire jouer à Manuel Valls le rôle de caution réaliste et sécuritaire de sa politique. Pendant la campagne des primaires citoyennes du PS, Arnaud Montebourg, concurrent de Valls, déclarait dans un débat que celui-ci n'avait plus beaucoup de chemin à faire pour se retrouver à l'UMP. C'était un propos polémique. Cette affirmation avait pour but d'éloigner de Valls des électeurs prenant part à ces primaires, mais cette légende peut maintenant le servir, ainsi que l'ensemble du gouvernement, dans l'opinion publique en général.

On a eu droit à un prétendu moment d'émotion  à propos de la récente visite de Valls à Madrid. Il y a rencontré son collègue espagnol. Valls est né à Barcelone en 1962, est devenu citoyen français, ... et parle espagnol comme un lycéen de Première qui a pris l'espagnol en LV II (2). Valls a cru opportun, voire nécessaire, de protester de son attachement à l'entité France aussi bien dans ses quelques mots en français et en castillan à Madrid que devant David Pujadas, également natif de Barcelone. Je constate que la Grande Nation traverse une phase de saoulographie cocardière assez navrante, de Jean-Luc Mélanchon avec son slogan "France, la belle, la rebelle" au FN en passant par les inepties de François Hollande souhaitant que, pour les jeunes issus de l'immigration, Français devienne le plus beau nom que puisse porter un citoyen du monde. Le mur du çon est franchi.

Manuel Valls a rappelé que pour lui et ses amis politiques l'immigration ne doit plus être "un chiffon rouge" agité "pour diviser les Français" (sic). Traduisez : débattre de l'immigration sud-nord et de ses conséquences doit rester, ou redevenir, un tabou, ce serait "prendre en otage" les immigrés. Autres rappels : il y aura régularisation de résidents illégaux appelés par litote "sans papiers", selon des critères qui seront les mêmes pour tous; et le Sinistre de l'Intérieur de souligner que, pour lui, l'intégration (3) est un sujet plus important, plus essentiel que les flux migratoires qu'il entend simplement "maîtriser", en luttant contre l'immigration clandestine (c'est bien la moindre des choses).

Les électeurs qui ne font pas le choix de la gauche, et qui font du beau Manuel leur ministre socialiste préféré doivent pourtant comprendre que le Sinistre de l'Intérieur :

-entend sortir l'immigration du débat politique : un prétendu consensus républicain devrait se dessiner autour de l'acceptation de la continuation et de l'amplification à moyen terme des flux migratoires sud-nord, et de politiques d'intégration ou "de la ville", quel qu'en soit le coût : ils (les immigrés) ont des droits sur nous et on a un devoir d'intégration à leur égard; une pluralité d'opinions sur la question n'est moralement et politiquement pas permise par la Gauche : ce serait une "prise d'otages" (sic);

-n'entend pas limiter le nombre d'illégaux régularisés : les critères de régularisation seront les mêmes pour tous, et c'est tout, et ce n'est pas rassurant;

-fera bénéficier les anciens "sans papiers", c'est-à-dire les résidents illégaux régularisés, des politiques d'intégration; donner des papiers à un sans papiers, c'est lui permettre de bénéficier des politiques spécifiques pour le logement, la formation professionnelle, l'emploi, l'éducation, le regroupement familial etc... L'expression "sans papiers" est trompeuse : les sans papiers ne se contentent pas de papiers; dès qu'ils ne sont plus "sans papiers", ils ont vocation à être vos voisins, les parents des camarades de classe de vos enfants, vos collègues, et demain vos concitoyens pour voter pour M. Valls et ses amis, et vous remplacer dans cette démarche si vous vous détournez de cette famille politique. Les régularisations de résidents illégaux qui deviennent ainsi nos voisins, collègues, concitoyens, on en a déjà eu, et d'ampleur massive : en 1981, en 1997. On a déjà donné.

Manuel Valls était encore maire de banlieue (4) ce 31 mai. Une partie de ses administrés a inventé de nouvelles formes d'expression, inspirées notamment des SMS ou textos. Pour maire d'Evry, on pourrait dire, sans trop d'iirévérence, merdévry. En s'inspirant simplement de cette culture, et aussi de Léon Daudet évoquant Edouard Herriot, le "merdelion". En matière de communication, Manuel Valls s'y connaît : il a été directeur de la communication de la campagne présidentielle de François Hollande.

Dans cette fonction, il a défendu Ségolène Royal lorsque celle-ci a prétendu que Nicolas Sarközy avait besoin d'être réelu pour échapper à la justice (recyclage d'un argument utilisé contre Silvio Berlusconi par ses adversaires politiques et des médiats locaux et internationaux). Si cette affirmation de Madame Royal n'est pas confirmée, Manuel Valls se sera associé à une campagne diffamatoire.


NOTES

(1) Manuel Valls avait proposé que le PS change de nom, abandonne le mot "socialiste", et se réfère simplement à la Gauche; c'était avant que Jean-Luc Mélanchon ne quitte le PS et ne fonde son propre parti, le Parti de Gauche; désigner Manuel Valls comme Sinistre, c'est satisfaire un de ses voeux;

(2) LV II = 2e langue vivante étrangère;

(3) Manuel Valls a bien eu tort de refaire brièvement allusion à ses origines en évoquant l'importance de l'intégration des personnes issues des flux migratoires sud-nord. Cela signifie : ça a réussi pour moi et ma famille, donc je veux que d'autres en bénéficient aussi. Je suis d'avis au contraire que le critère le plus sûr d'une intégration réussie est l'abandon de la référence à l'expérience migratoire (mais pas forcément à la culture héritée). L'ancien immigré bien intégré est celui qui, devant la perspective de nouveaux flux migratoires, va se demander quelles en seraient les conséquences pour la communauté entière, et pas seulement pour les immigrés déjà en place. La bonne intégration d'un Allemand de souche huguenote française, dont les ancêtres ont quitté la France suite à la révocation de l'Edit de Nantes en 1685, peut se mesurer à ses réticences devant l'immigration extra-européenne aujourd'hui. Les Siciliens, les Calabrais et autres Italiens du Mezzogiorno qui ont fait souche dans le nord de l'Italie attestent de leur bonne intégration dans la communauté locale en soutenant la Lega Nord contre la perspective de nouveaux flux migratoires. Dire : je suis d'origine immigrée, mes parents ont été intégrés, ça a marché, et je veux que ça continue pour d'autres, c'est alimenter la méfiance, illustrer sa partialité;

(4) pour moi, la notion de banlieue a d'abord eu un tout autre sens : la banlieue, c'était les territoires desservis par des "trains de banlieue", c'est-à-dire des trains électriques, peu bruyants et ne dégageant pas de fumée; c'était un endroit où les maisons individuelles s'appelaient des pavillons; c'était un endroit où les maisons étaient vendues par l'intermédiaire d'agences immobilières et non directement par les notaires (comme dans l'Aisne d'où je venais); enfin, c'était un espace intermédiaire entre la grande ville, Paris en l'occurence, et la province proche. Il y a une dizaine de jours, un authentique "produit de banlieue" d'aujourd'hui qui voyageait comme moi sur la ligne C du RER transilien m'a intimé l'ordre de m'éloigner de lui et de son camarade si je voulais "rentrer chez (moi) en paix" (sic) : le camarade fumait dans le train et je lui avais demandé d'éteindre sa cigarette, en vain. Aux menaces, le "produit de banlieue" d'origine visiblement africaine ou afro-caribéenne, a ajouté l'explication contextuelle suivante : c'est Hollande qu'est passé, alors on s'en bat les couilles, tu peux plus nous faire chier (re-sic).



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jeudi 2 juin 2011

La reddition de Breda (5 juin 1625) : l'Histoire et l'image

La Reddition de Breda (1), ou Les Lances, est un tableau de Diego Rodriguez de Silva y Velazquez (°1599, Séville) exposé au Musée du Prado à Madrid ; il s’agit d’une oeuvre de dimensions imposantes : un tableau à l’huile sur toile de 3,81 m sur 3,07 m.

Velazquez a reçu commande du tableau en 1634 et l’a achevé en 1635, soit dix ans après l’évènement qu’il illustre. Âgé de 35 ans, Velazquez est déjà une peintre célèbre. Il n’a pas assisté à la reddition de Breda, ne s’y est jamais rendu, mais a rencontré un des acteurs principaux de l’évènement, Ambroise Spinola, représenté sur le tableau : ils ont même effectué ensemble la traversée de la Méditerrannée occidentale entre Barcelone et Gênes en 1629 lors d’un voyage de Velazquez en Italie.

LE SIEGE ET LA REDDITION DE BREDA : LE CONTEXTE HISTORIQUE
La reddition de Breda est un épisode du conflit généralement désigné en Belgique et aux Pays-Bas sous le nom de Guerre de Quatre-Vingt Ans (1566 ou 1568-1648), qui oppose des provinces qui se désignent à partir de 1581 sous le nom de Provinces-Unies, gagnées largement à la Réforme calviniste d’une part (en gros l’actuel Royaume des Pays-Bas), et des provinces situées au sud des premières (en gros l’actuel Royaume de Belgique agrandi d’une partie du nord de la France, mais diminué du pays de Liège), administrées depuis Bruxelles par un gouverneur pour le compte du roi Habsbourg d’Espagne, d’autre part. Les provinces du Nord se sont unies en 1579 par l’Union d’Utrecht à l’instigation de nobles locaux (on dit "naturels") dont Guillaume d’Orange, dit Guillaume le Taciturne ; elles ont pris le nom de Provinces-Unies deux ans plus tard (Acte de La Haye, 25 juillet 1581), et se sont ainsi séparées des autres provinces qui ont maintenu leur allégeance envers la couronne d’Espagne et leur adhésion à la foi catholique romaine (Union d’Arras, 1579). Les causes de cette séparation sont complexes et multiples (religieuses, fiscales, commerciales, relatives à la culture politique : les nobles locaux restent attachés au modèle d’origine féodale de l’héritage bourguignon, tandis qu’à partir de Philippe II la couronne d’Espagne évolue vers la monarchie absolue et une forme d’Etat-nation). Le Sud ne reconnaît pas la sécession du Nord qui ne sera entérinée qu’en 1648 par l’un des Traités de Westphalie.

Breda est une ville du nord du Brabant historique, actuellement située dans le Royaume des Pays-Bas.

 Les troupes des Provinces-Unies y tiennent garnison dans ce premier quart du 17e siècle.. Le gouverneur de la ville est, depuis 1601, Justin de Nassau, fils illégitime de Guillaume d’Orange, dit le Taciturne. On attribue à cette place de Breda une grande importance stratégique.

Depuis 1602, le roi d’Espagne a à son service un aristocrate gênois, Ambroise Spinola, qui a le double mérite de faire partiellement la guerre à ses frais, et de maîtriser la technique des sièges de places fortes. En août 1624, Ambroise Spinola décide d’entreprendre le siège de Breda, défendue par Justin de Nassau.
Ce dernier compte sur l’intervention d’alliés et de ses demi-frères pour dégager Breda. Ces secours ne lui étant pas apportés, Justin entreprend de négocier la capitulation de la place de Breda. Le 2 juin 1625, l’accord se fait sur les termes de la reddition : Justin sera autorisé à quitter la ville le 5 avec ses officiers et les survivants de la garnison et à se retirer librement avec eux vers le nord "selon les coutumes de la guerre, [...] drapeaux déployés, au son des tambours". Ambroise Spinola garantit en outre que les habitants de Breda seront traités avec clémence et que toute violence, tout pillage à leur encontre sont interdits sur son commandement, engagement qui sera tenu.


Le récit d’un témoin oculaire :
Un contemporain anglais, Gerrat Barry, qui a assisté à la scène, la décrit ainsi : " Spinola, accompagné par un groupe important de nobles et d’officiers [...] salua courtoisement tous les capitaines à leur arrivée et d’abord le gouverneur Nassau, vénérable par ses cheveux gris, sa femme et ses enfants, le fils d’Emmanuel de Portugal et les deux bâtards du prince Maurits (2). Ceux-ci, sans perdre leur contenance, [...] le saluèrent en inclinant modestement leurs bannières. On n’entendit de part et d’autre aucun cri ignominieux, nulle provocation, et tous sourirent en conservant une expression aimable" (3)


Et voici l’interprétation d’un poète, l’année même de la reddition de Breda :
Le dramaturge castillan (d’origine partiellement wallonne) Pedro Calderon de la Barca a écrit dès 1625 une pièce, intitulée El sitio de Breda, qui fut jouée dans les théâtres de Madrid, et dans laquelle il prête à Spinola, s’adressant à Justin, les propos suivants :

Justino, yo las recibo
Y conozco que valiente
Sois. Y el valor del vencido
Hace famoso al que vence.

Autrement dit :

Justin, je les (les = les clés) reçois
Et je reconnais que vaillant
Vous êtes. Et la valeur du vaincu
Rend célèbre celui qui vainc.


Après le mémorialiste et témoin oculaire (Gerrat Barry), puis le poète (Calderon de la Barca), voici comment, dix ans après l’évènement, Velazquez en rend compte :
http://www.safran-arts.com/42day/art/art4aug/velasqez/breda.html
Sur la gauche du tableau, les "Hollandais" ; à droite, les "Espagnols" et les "Bourguignons" (4).


On examinera ci-après le tableau, par "détails" et tout d’abord, au centre, entre les deux groupes, les commandants respectifs, acteurs de l’évènement :
http://les.tresors.de.lys.free.fr/grenier_du_3mars2006/peintres/velasquez/galerie4_rdition_de_breda__1634_1635/0404vela.jpg
A droite, Ambroise Spinola, 36 ans, le commandant "espagnol" ; son insigne de commandement est l’écharpe rose rouge (en espagnol, le fajin, avec un accent aigu sur le i) qui va de son col à l’arrière en passant par la ceinture ; il est descendu de cheval pour se mettre au même niveau que son adversaire malheureux et ne pas l’humilier ; il tient chapeau et bâton de commandement de la main gauche pour conserver libre la main droite qu’il pose sur l’épaule de son adversaire vaincu pour le réconforter et l’empêcher de s’agenouiller ;
à gauche, Justin de Nassau, 46 ans, commandant "hollandais", gouverneur de Breda, demi-frère de Guillaume d’Orange, tend les clefs de la ville à son vainqueur magnanime qui, en cet instant, paraît les dédaigner.
Dans la partie supérieure du tableau, à droite, on peut voir :
http://les.tresors.de.lys.free.fr/grenier_du_3mars2006/peintres/velasquez/galerie4_rdition_de_breda__1634_1635/0405vela.jpg
un alignement de lances (5) ou de hallebardes espagnoles ou "bourguignonnes" : il y en aurait 29 tandis qu’on n’en dénombre que 5 en haut et à gauche du tableau, du côté "hollandais" ; à droite de Spinola, et par dessus son cheval , on reconnaît des officiers espagnols ou "bourguignons" portant la fraise ; deux d’entre eux semblent regarder le spectateur comme pour le prendre à témoin ; le visage de l’un d’eux, fortement éclairé, n’a pu être identifié, mais il s’agit d’un officier de haut rang, comme en témoigne son "fajin" rose rouge : on a avancé quelques noms : le prince de Neubourg, Albert d’Arenbergh, Gonzalo de Cordoue, ou Carlos Coloma, sans pouvoir trancher ; le "drapeau" à carreaux blancs et bleus est celui des vainqueurs.
Sur la gauche du tableau, dans sa partie inférieure et centrale, on peut voir :
http://les.tresors.de.lys.free.fr/grenier_du_3mars2006/peintres/velasquez/galerie4_rdition_de_breda__1634_1635/0403vela.jpg
quelques combattants "hollandais", dont un jeune porteur de mousquet en habit vert qui semble regarder le spectateur pour le prendre à témoin, et fait ainsi pendant à l’officier à "fajin" non identifié dont il était question au paragraphe précédent.
Et en haut, à gauche,
http://les.tresors.de.lys.free.fr/grenier_du_3mars2006/peintres/velasquez/galerie4_rdition_de_breda__1634_1635/0402vela.jpg
Est-ce l’écuyer de Justin qui porte une chemise blanche ornée de motifs de couleur orange, bleue ou verte, et s’adresse à des compagnons en appuyant son propos d’un mouvement de la main droite, l’index levé ?


LE TABLEAU DE VELAZQUEZ ET LA REALITE DE L’EVENEMENT
On a vu que Velazquez n’avait pas été témoin oculaire de la reddition de Breda, ne s’était jamais rendu sur les lieux, et a peint cette huile sur toile dix ans après l’évènement, mais qu’il a longuement rencontré Ambroise Spinola, notamment lors d’une traversée entre Barcelone et Gênes.
Le relief brabançon est plus marqué sur le tableau qu’il ne l’est naturellement.
La fatigue et les marques des épreuves endurées par les assiégeants vainqueurs n’apparaissent pas sur le tableau.


Les différences entre la réalité historique et géographique et la représentation de l’évènement à travers le tableau de Velazquez portent essentiellement sur deux points : le relief est plus accentué sur le tableau qu’il ne l’est dans la réalité ; le tableau, visant à illustrer la grandeur et la puissance espagnoles, montre "Espagnols" et "Bourguignons" avec des tenues et des attitudes qui permettent de les identifier comme les incontestables vainqueurs (nombre de lances, expression des visages, qualité des tenues), alors que les contemporains témoins de la reddition avaient relevé les marques des épreuves dans l’attitude et la tenue des vainqueurs après plus de 9 mois de siège, tandis que les "Hollandais" apparaissaient relativement moins éprouvés qu’on aurait pu s’y attendre au sortir de ce siège.

Dans le lointain, on aperçoit des fumées d’incendies, des restes de fortifications, et la présence de l’eau, provenant d’inondations provoquées par des ruptures volontaires de digues : ces derniers éléments sont historiquement attestés. Le siège est fini, mais les traces des hostilités sont encore visibles.


Il est un tableau du Musée du Prado qui reflète plus fidèlement la réalité des lieux : celui du peintre flamand Pieter Snayers ; il représente l’infante et archiduchesse Isabelle, venue à Breda depuis Bruxelles pendant le siège, soit entre août 1624 et juin 1625, pour suivre le déroulement des opérations :

https://www.museodelprado.es/coleccion/obra-de-arte/isabel-clara-eugenia-en-el-sitio-de-breda/242dc4ce-76dc-455a-ba51-70ae3a49

Un autre tableau, du peintre lorrain Jacques Callot, est exposé au Musée d’Art de l’Université de Princeton (Etats-Unis) : il représente un instant de la reddition de Breda postérieur a celui qu’a immortalisé Velazquez : Spinola assiste au départ de la garnison "hollandaise" qui défile devant lui en direction du nord, Justin de Nassau et sa famille se trouvant dans une voiture en tête de la colonne. Jacques Callot n’a pas assisté à l’évènement, mais s’est rendu sur les lieux pour les étudier. Il a exécuté ce tableau pour l’infante et archiduchesse Isabelle en 1627, deux ans après la reddition et bien avant que Velazquez ne reçoive commande du sien en 1634.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Siege_of_Breda.jpg


LA PLACE DE "LA REDDITION DE BREDA" DANS UN PROJET ICONOGRAPHIQUE ROYAL
Le tableau a été commandé à Velazquez pour décorer, avec d’autres tableaux, le Salon des Royaumes du Palais du Buen Retiro, à Madrid (inauguration du palais : 5 et 6 décembre 1633). Il s’agissait d’attester du début glorieux du règne de Philippe IV (6), surnommé le Roi Planète, voire Hercules Hispanicus, par douze tableaux (comme les douze travaux d’Hercule) immortalisant des victoires espagnoles survenues entre 1622 (seconde année du règne de Philippe IV) et 1633 (inauguration du Palais du Buen Retiro). La Reddition de Breda était l’un d’eux, parmi d’autres dont La Reddition de Juliers, la Bataille de Fleurus etc...Au-delà de la réalité historique, le tableau de Velazquez entend célébrer la force et la magnanimité de l’Espagne, illustrer une conception chrétienne de la conduite de la guerre. L’image du souverain espagnol vainqueur et magnanime vient de plus loin que de la Guerre de Quatre-Vingt Ans : en 1492, à la fin de la Reconquista, lors de la prise de Grenade par Ferdinand et Isabelle, le premier avait refusé que Boabdil, le dernier roi maure, descendît de cheval pour lui remettre les clefs de la ville (pour que son adversaire vaincu demeure à son niveau et ne s’humilie pas). Cette image, attestée par des témoins de la reddition de Grenade, devait être connue de Velazquez et de ses contemporains, et avoir "fait son chemin" dans l’imaginaire des illustrateurs des hauts faits de l’histoire de l’Espagne.


Gerrat Barry (3) relevait : "Spinola se montra sage en préférant établir une réputation de clémence plutôt que de sévérité [...]. Il fit plus de cas du gain de temps ainsi obtenu que des dépouilles possibles de Breda, au vrai peu importantes. En vérité, il jugea profitable de préférer la majesté et la clémence de son roi, dont il était ici le représentant, que de donner libre cours à un appétit de gloire et à un désir de revanche"


Breda sera reprise par les Hollandais en 1639, soit quatorze ans après la reddition de Justin de Nassau et quatre ans après l’achèvement du tableau par Velazquez. La ville sera donc au pouvoir des Hollandais en 1648 lors de la conclusion des Traités de Westphalie qui marqueront la fin de la Guerre de Quatre-Vingt Ans, et la reconnaissance de la sécession des Provinces-Unies par les Habsbourg qui conserveront les provinces du sud.


NOTES
(1) on parlera de La Reddition de Breda avec un "R" majuscule au second mot pour désigner le tableau de Velazquez et de la reddition de Breda avec un "r" miniscule pour désigner l’évènement du 5 juin 1625 ;
(2) le prince Maurits (Maurice) est un demi-frère de Justin de Nassau ; il est mort peu avant la reddition sans pouvoir porter assistance à Justin qui avait auprès de lui, à Breda, ses deux neveux, enfants illégitimes de Maurits ;
(3) d’après Gerrat Barry, The Siege of Breda, publié à l’origine en latin et à Louvain en 1627 ;
(4) par "Bourguignons", on entend ici les personnes originaires des provinces de l’actuelle Belgique (moins le pays de Liège, mais avec en plus une partie de l’actuel nord de la France) ; ces provinces sont placées sous la suzeraineté des Habsbourg depuis le mariage de Marie de Bourgogne, fille du duc Charles le Téméraire, avec Maximilien d’Autriche (ou de Habsbourg) ; elles sont demeurées sous cette suzeraineté en 1579 par l’Union d’Arras ;
(5) "Les Lances" (Las Lanzas) est un autre nom du tableau de Velazquez "La Reddition de Breda" ;
(6) Le roi d’Espagne Philippe IV est le beau-père du roi de France et de Navarre Louis XIV, étant le père de Marie-Thérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV ; la première épouse de Philippe IV était la propre fille de Henri IV, roi de France et de Navarre ; il existe un portrait de ce monarque portant l’armure, réalisé par Velazquez :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Retrato_de_Felipe_IV_en_armadura,_by_Diego_Vel%C3%A1zquez.jpg

CREDITS
Bartolomé Bennassar : Les Lances de Breda de Velazquez, Armand Colin, 2008 ;
Arturo Perez Reverte : Le Soleil de Breda, Le Seuil, 2000 ;
Antonio Ortiz Dominguez et allii, Velazquez, Museo del Prado, 1990 ;
le site http://amis-arts.com/ ;
le site http://le.tresor.des.lys.free.fr/
le site http://www.safran-arts.com/

lundi 2 mai 2011

Tres de Mayo (3 mai 1808)

CONTEXTE HISTORIQUE :

Pour imposer l’application du Blocus Continental (contre le Royaume-Uni) au Portugal, Napoléon Ier a entrepris la conquête de ce pays par la voie terrestre ; à cette fin, il a conclu avec l’Espagne le traité de Fontainebleau (29 octobre 1807) ; les troupes napoléoniennes, commandées par Junot, transitent par l’Espagne et contrôlent les communications entre l’Espagne et le Portugal ; elles sont suivies d’autres troupes, commandées par Murat, qui procèdent à une occupation de points du territoire espagnol au-delà de ce que prévoyait le traité de Fontainebleau. La famille royale espagnole, dont le chef songe à fuir vers les Amériques et s’est retiré à Aranjuez, est divisée, et l’inquiétude se répand dans le pays quant aux intentions de l’ Empire Français. Napoléon convoque et retient à Bayonne le roi Charles IV et son fils aîné (30 avril 1808). A Madrid se répand une rumeur (1) : non seulement Napoléon retient le roi prisonnier à Bayonne, mais les troupes françaises s’apprêteraient à enlever le dernier membre de la famille royale demeuré à Madrid, l’infant Francisco de Paula, 14 ans. En réaction à cette rumeur, une partie de la population de Madrid se soulève contre les troupes napoléoniennes : c’est le soulèvement du Dos de Mayo (2 mai 1808).


Le jour de l’insurrection madrilène du Dos de Mayo (2 mai) 1808, le général Murat (2) note : "Le peuple de Madrid, abusé, s’est laissé entraîner à la révolte et au meurtre" et déclare : "du sang français a coulé ; il demande à être vengé". A titre de représailles, environ 400 personnes seront fusillées à Madrid dans la nuit du 2 au 3 mai 1808. Un célèbre tableau de Francisco de Goya y Lucientes illustre un détail, au sens pictural du terme, de la répression du soulèvement de la veille :
http://lewebpedagogique.com/lapasserelle/files/2009/03/francisco_de_goya_y_lucientes_023.jpg

"La scène décrite dans Tres de Mayo se tient dans les premières heures du matin qui suit le soulèvement et est centrée sur deux masses d’hommes : un groupe désorganisé de captifs tenus pratiquement à bout portant par les fusils d’un peloton d’exécution posant de façon rigide. Bourreaux et victimes se font face et "dans un éclair de génie [Goya] a fait se contraster l’attitude féroce des soldats et les lignes d’acier de leurs fusils avec la masse s’écroulant de leur cibles" (Kenneth Mackenzie Clark). Une lanterne carrée située entre les deux groupes projette une lumière dramatique sur la scène. La zone la mieux éclairée est celle des victimes sur la gauche. Immédiatement à la droite de ce groupe et au centre de la toile se trouve les figures d’autres condamnés se tenant en ligne dans l’attente d’une exécution future. La figure centrale de la toile est l’homme à genoux entre les corps de ceux déjà exécutes, les bras ouverts est brillamment éclairé (ses bras en croix laissent apparaître des stigmates sur l’une de ces mains). Ses habits jaunes et blancs répètent les couleurs de la lanterne.


Sur la droite se tient le peloton d’exécution, pris dans les ombres et dépeint comme une unique unité monolithique. Pratiquement vus de dos leurs visages ne peuvent être vus, leurs baïonnettes et leurs shakos (les couvre-chefs militaires qu’ils portent) forment une colonne implacable et immuable. Sans que cela ne distraie de l’intensité de la scène au premier plan, l’on peut apercevoir dans l’obscurité, à l’arrière plan, un village et un clocher qui se découpent au loin".


"Dans son tableau, Goya n’oublie pas de faire figurer l’Église. Au premier rang des victimes, agenouillé, ou en train de prier Dieu, se trouve un prêtre tonsuré et en robe de bure. L’Église dans le conflit a joué un rôle prépondérant, appelant à la résistance et fournissant des prêtres prêts à prendre les armes. [...]. L’Église est farouchement opposée à l’Empereur, qui a fait fermer les deux tiers des couvents espagnols et supprimer l’Inquisition. Elle est par ailleurs historiquement très liée à la monarchie, menacée par Napoléon. La terreur dans leurs visages est stupéfiante. Goya remarque aussi l’obscurité du ciel"
(Wikipedia en français, article : Tres de Mayo).

NOTES

(1) Les causes du soulèvement sont multiples, mais il semble avoir été déclenché par l’inquiétude liée à une rumeur concernant le sort du dernier membre de la famille royale présent à Madrid, l’infant Francisco de Paula : selon cette rumeur, son enlèvement par les troupes de Murat était imminent (i Que nos lo llevan !), ou "Ils nous l’enlèvent", ou "Ils vont nous le prendre" ; de fait, il semble bien qu’il ait été question de conduire Francisco de Paula, 14 ans, auprès de ses parents et de son frère Ferdinand, retenus à Bayonne par Napoléon Ier ;


(2) Joachim Murat est le beau-frère de Napoléon Ier par son mariage avec la soeur de celui-ci, Caroline Bonaparte ; en août 1808, soit trois mois après les évènements relatés ci-dessus, il deviendra roi de Naples.

dimanche 1 mai 2011

Dos de Mayo (2 mai 1808)

Les événements des 2 et 3 mai 1808 à Madrid (soulèvement d’une partie de la population madrilène contre les troupes napoléoniennes, et répression du soulèvement par Joachim Murat, beau-frère de Napoléon I (et, à l’époque, futur roi de Naples) s’inscrivent dans un contexte historique dont on trouvera ci-après le rappel des principales données :

LE CONTEXTE PANEUROPEEN
Dans le cadre des hostilités entre l’Empire Français (1) et le Royaume-Uni, Napoléon Ier instaure par décret, depuis Berlin, le 21 novembre 1806, le Blocus Continental dont les principales dispositions sont les suivantes :

Tout commerce avec le Royaume-Uni est totalement défendu ;
Les marchandises britanniques présentes sur le continent sont confisquées ;
Toute correspondance du, ou pour le Royaume-Uni est détruite ;
Tout Britannique se trouvant en France ou dans l’Empire est fait prisonnier de guerre ;
Tout navire ayant mouillé dans un port britannique est de bonne prise.

Ce décret est immédiatement applicable dans l’Empire Français et les pays placés de droit ou de fait sous son contrôle ; son application est étendue par traité à d’autres puissances, notamment la Prusse et la Russie, par le traité de Tilsitt (7 juillet 1807).

L’application du Blocus Continental rencontre des difficultés particulières dans deux pays : le Royaume de Hollande dont le souverain est le propre frère de Napoléon, le roi Louis , et le Portugal ; le problème hollandais est réglé par l’annexion pure et simple du pays à l’Empire Français (2) ; Napoléon Ier compte régler le problème portugais en envahissant ce pays, dont le partage est en outre prévu, avec la constitution, au sud, d’une principauté des Algarves sur laquelle régnerait le ministre Manuel Godoy, favori et amant de la reine Marie-Louise, épouse du roi d’Espagne Charles IV ; à cette fin, Napoléon Ier conclut le 29 octobre 1807 un traité avec l’Espagne (traité de Fontainebleau). L’armée commandée par le général Junot transite par l’Espagne pour envahir le Portugal.

LE CONTEXTE ESPAGNOL
A la suite de l’armée de Junot, Napoléon Ier envoie en Espagne des troupes commandées par le général Murat ; ces troupes s’installent en Espagne dans des places dont le contrôle ne présente pas un rapport évident avec l’application du traité de Fontainebleau et la conquête du Portugal. La famille royale espagnole se réfugie dans sa résidence d’Aranjuez, près de Madrid, pour ne pas paraître soumise aux pressions françaises et se ménager une possibilité de fuite discrète, peut-être vers les Amériques, par Séville : 65 000 soldats de l’Empire Français contrôlent non seulement les communications avec le Portugal et la frontière franco-espagnole, mais aussi Madrid et plusieurs grandes villes. L’infant Ferdinand, 24 ans, prince des Asturies, renverse son père, le roi Charles IV (émeute d’Aranjuez, mars 1808). Napoléon Ier refuse de reconnaître le jeune roi Ferdinand, et convoque la famille royale à Bayonne où, après son fils Ferdinand, le roi Charles IV arrive le 30 avril. A Madrid, la tension est extrême : la population craint que l’infant Francisco de Paula, 14 ans, dernier membre de la famille royale encore à Madrid, ne soit enlevé par les troupes de Murat (3) tandis que les autres membres de la famille royale semblent retenus prisonniers (4) à Bayonne. La rumeur circule : "i Que nos lo llevan !" (5). Une partie de la population se soulève le 2 mai contre les troupes impériales. Parmi les insurgés célèbres de ce Dos de Mayo : un général cantabrien, Pedro Velarde, et des femmes, dont Manuela Malasaña (6) et Clara del Rey. Un célèbre tableau de Francisco de Goya y Lucientes immortalise la charge de Mameluks à la Puerta del Sol, ce 2 mai 1808.
http://lili.butterfly.free.fr/ole/images/prado/goya_2mai.jpg

La Communauté Autonome (région) de Madrid célèbre le Dos de Mayo comme le Jour de la Communauté (Dia de la Comunidad Autonoma de Madrid).
Le tableau est peint en 1814 par Francisco de Goya y Lucientes, après que Ferdinand VII ait été rétabli sur le trône d’Espagne ; peut-être l’attitude parfois hésitante du peintre pendant l’occupation napoléonienne (7) l’a-t-elle conduit à manifester son loyalisme envers la dynastie des Bourbons restaurée en illustrant un moment du début du conflit connu en France sous le nom de Guerre d’Espagne (1808-1814), au Portugal et dans les pays anglophones sous le nom de Guerre Péninsulaire, en Espagne sous le nom de Guerre d’Indépendance Espagnole (8). Goya n’a pas assisté à la scène. La couleur dominante est le rouge. Des mercenaires égyptiens au service de l’Empire Français, à cheval et armés, chargent des insurgés espagnols à terre.

NOTES

(1) L’Empire s’étend de Bayonne à Hambourg, de la Frise à Regio ;

(2) Le roi Louis, père du futur Napoléon III, essaiera sincèrement de se faire estimer, voire aimer, si cela avait été possible, de ses sujets hollandais dont il apprend la langue, refusera à Napoléon Ier d’instaurer la conscription qui aurait été très impopulaire, et placera avant tout la défense des intérêts hollandais dans la mesure où il pouvait tenir tête à son frère ; c’est pourquoi il rechignera à appliquer le Blocus Continental dont l’impact était très négatif sur l’économie, déjà chancelante, de son Royaume ; Louis est contraint de satisfaire des exigences de l’Empire Français en matière de rectification de frontières (des territoires au sud du Royaume de Hollande sont annexés à l’Empire Français qui a déjà absorbé la future Belgique), puis l’ensemble du Royaume de Hollande est annexé, divisé en départements de l’Empire Français ; le roi Louis doit s’enfuir à Vienne ; il se tiendra à l’écart de l’équipée des Cent Jours de son frère en 1815 ;

(3) Il semble que Francisco de Paula, 14 ans, ait été en passe d’être conduit à Bayonne auprès de ses parents et de son frère, retenus par Napoléon Ier ;

(4) La famille royale espagnole est tombée dans un guet-apens à Bayonne : Charles IV doit abdiquer et remettre à Napoléon Ier le soin de lui désigner un successeur (ce sera Joseph Bonaparte, un frère de Napoléon Ier, qui sera installé sur le trône d’Espagne), tandis que Ferdinand VII est retenu prisonnier en résidence au château de Valençay ; les difficultés de la famille royale sont liées à la faiblesse du roi Charles IV, dont l’épouse a pour favori et amant, l’impopulaire ministre Godoy, intéressé au partage du Portugal, aux dissensions entre partisans de l’influence des Lumières (los ilustrados, ou intellectuels) peut-être disposés, pour certains à pactiser avec les occupants français, et les milieux, y compris populaires, attachés au régime bourbonien, à la monarchie légitime ;

(5) "Ils (les Français) nous l’enlèvent !";

(6) Une station de la ligne 12 du métro de Madrid porte son nom ; elle fut exécutée parce qu’elle portait une arme (une paire de ciseaux) ; elle avait 15 ans et était brodeuse ; elle était fille d’un boulanger d’origine française, Jean Malesange, qui hispanisa son patronyme en Malasaña ;

(7) Francisco de Goya y Lucientes était un temps considéré proche des "ilustrados", inspirés par les idées des Lumières ; certains d’entre eux considéraient avec faveur certaines réformes (ex. : abolition de l’Inquisition) introduites sous la pression napoléonienne ;

(8) Les conséquences de cette guerre seront désastreuses pour l’Empire Français, comme pour les pays ibériques :

le mythe de l’invinciblité des armées napoléoniennes sera mis à mal par la défaite, suivie de la reddition du général Dupont à Bailen (18-22 juillet 1808), les efforts de Napoléon Ier pour maintenir son frère sur le trône d’Espagne seront très coûteux en hommes et en ressources qui feront défaut à l’Empire Français au cours des années suivantes, qui précèderont sa chute ; exilé à Sainte-Hélène, Napoléon a paru prendre la mesure du désastre ; il confie à Las Cases : « Cette malheureuse guerre d’Espagne a été une véritable plaie, la cause première des malheurs de la France […] j’embarquai fort mal toute cette affaire, je le confesse ; l’immoralité dut se montrer par trop patente, l’injustice par trop cynique, et le tout demeure fort vilain, puisque j’ai succombé »;

l’Espagne, coupée de ses colonies d’Amérique par l’occupation napoléonienne et la guerre, verra celles-ci s’éloigner de la métropole, puis prendre leurs indépendances (à l’exception des Antilles espagnoles) sans pouvoir y restaurer son autorité. L'exil au Brésil (1807-1821) du régent du Portugal prépare la séparation des deux pays : le Brésil proclame son indépendance en 1822, indépendance que le Portugal devra reconnaître en 1825.